L’Union européenne : quand les intérêts économiques piétinent les valeurs européennes incarnées par l’Union

L’Union européenne et le Rwanda ont signé, le 19 février 2024

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L’Union européenne et le Rwanda ont signé, le 19 février 2024, un protocole d’accord sur les chaînes de valeur durables pour les matières premières. Cet accord intervient au moment où la communauté internationale condamne le Rwanda pour son soutien au groupe rebelle M23, l’un des groupes majeurs parmi plus de 100 opérant à l’est du Congo, identifiés jusqu’à présent. Depuis le 13 février 2024, les forces du M23 ont encerclé Goma, chef-lieu de la région du Nord Kivu, une des régions de l’est du Congo, productrices de minerais qualifiés de « minerais critiques » par l’UE, dont le coltan. Le coltan, également appelé colombite, est un minéral rare à base de niobium et de tantale, principalement utilisé dans l’industrie aérospatiale pour sa résistance aux hautes températures et sa conductivité électrique. Ce minéral est également essentiel pour la fabrication de smartphones, d’ordinateurs et de diverses technologies modernes.

L’exploitation et l’exportation illégales de ces minerais via les pays limitrophes de la République Démocratique du Congo entretiennent les conflits, sèment le chaos et déciment la population de l’est du Congo depuis plusieurs décennies. Cet état de choses fait de l’est du Congo l’axe de la mort où la terreur et la désolation cohabitent au quotidien. La vie des êtres humains, surtout celle des femmes et des enfants, n’a aucune importance aux yeux des contrebandiers de ces minerais critiques que l’Union européenne a légitimés par un accord au mépris de ses propres normes.

Condamner le Rwanda pour son soutien au groupe rebelle du M23 et en même temps signer un accord de coopération sur les minerais critiques fournis exclusivement au Congo est une illustration flagrante d’hypocrisie et de mépris envers les propres valeurs de l’Union européenne. Cette situation met en lumière les contradictions et les compromissions auxquelles les acteurs politiques peuvent se livrer au nom d’intérêts économiques ou géopolitiques.

Le Rwanda, en apportant un soutien au groupe rebelle du M23, est directement impliqué dans des actions répréhensibles qui menacent la stabilité de la région des Grands Lacs en Afrique.
Les activités de ce groupe rebelle ont entraîné des violences, des déplacements massifs de populations et ont déstabilisé la région dans son ensemble. Condamner de telles actions devrait être une priorité pour tous les acteurs internationaux soucieux de promouvoir la paix et la sécurité à l’est du Congo qui saigne toujours sous l’œil indifférent de la communauté internationale et des autorités congolaises.

En signant un accord de coopération sur les minerais critiques provenant exclusivement du Congo, le Rwanda tente de légitimer ses pratiques tout en profitant des ressources naturelles du pays voisin. Il est ironique de constater que l’Union européenne, qui prône des valeurs telles que le respect des droits de l’homme et la lutte contre l’exploitation illégale des ressources naturelles, puisse accepter un tel accord. Cela soulève des questions sur la cohérence des actions de l’UE et sa capacité à défendre ses propres principes.

Il est crucial pour la communauté internationale de prendre des mesures concrètes pour condamner ces pratiques et mettre fin à l’impunité des responsables impliqués dans le soutien aux groupes rebelles et l’exploitation des ressources naturelles de manière illégale. Les violations des droits de l’homme et les conflits armés ne peuvent être tolérés sous aucune circonstance, et il est impératif de faire respecter les normes internationales en la matière.

Nous considérons que, condamner le Rwanda pour son soutien au M23 tout en signant un accord sur les minerais critiques avec le Congo est une hypocrisie qui ne peut être ignorée. Il est temps pour les acteurs internationaux de prendre leurs responsabilités et de s’engager résolument en faveur de la paix, de la justice et du respect des droits fondamentaux des populations affectées par ces conflits.

Guy-Patrick Kiba
Avocat à la Cour,

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